Rappel
Le koala ressemble à un drôle de petit ours qui aurait une fourrure soyeuse, de grandes oreilles poilues et un gros nez aplati. Cet animal placide et sans défense semble n'avoir jamais quitté
l'Australie et ses grandes forêts d'eucalyptus.
Le nom scientifique du koala, Phascolarctos, signifie "ours à poche", or cet animal n'a rien de commun avec l'ours, mammifère placentaire. Il appartient en effet au groupe des mammifères
marsupiaux, autrement dit, à poche, comme les kangourous. Les deux grands groupes de mammifères marsupiaux et placentaires, se sont séparés très tôt il y a environ 100 millions d'années, dès la fin
de l'ère secondaire.
Grâce à L’examen et à la datation des fossiles de marsupiaux dispersés à travers le monde, les scientifiques ont pu reconstituer peu à peu leur origine géographique et leur histoire. L'hypothèse
la plus vraisemblable est qu'ils sont nés en Amérique et qu'ils ont migré, par l'antarctique, jusqu'en Australie. Selon d'autres auteurs, ils sont, au contraire, nés en Australie, d'où ils
auraient colonisé d'autres continents, et en particulier l'Amérique. Ce qui est sûr, c'est que sur cette grande île, les marsupiaux se sont retrouvés à l'abri de leurs concurrents placentaires et
ont pu ainsi se diversifier à leur aise, comme, ailleurs, leurs homologues placentaires.
Cependant, l'histoire des marsupiaux d'Australie reste mal connue, car il existe peu de fossiles et aucun n'est antérieur à 23 millions d'années. Avant, les paléontologues en sont réduits à des
spéculations. L'hypothèse qui domine actuellement au sujet du koala stipule que vers - 35 millions d'années, au milieu de l'ère tertiaire, une branche issue de la souche marsupial primitive s'est
divisée, pour donner naissance à la fois aux koalas et à leurs cousins les wombats. Vers la fin de l'ère tertiaire, au miocène, il n'existait pas moins de cinq koalas d'espèces différentes,
réparties en trois genres. On ne sait pas très bien à quoi ils ressemblaient, car tout ce qu'on a retrouvé d'eux, ce sont quelques dents et fragments de crâne. Il semble que, de ces trois genres
fossiles, un seul ait survécu jusqu'au pléistocène, au début du quaternaire, vers - 1,5 million d'années. C'est Phascolarctos. À l'époque, ce genre regroupait deux espèces, P. cinereus, le petit
koala actuel, et P. stirtoni, qui s'est peu à peu éteint au cours du pléistocène. C'était un koala vingt fois plus gros que celui que nous connaissons. On en a trouvé - en Australie - des
fossiles datant d'il y a - 40 000 ans, c'est-à-dire hier... Mais il a disparu, peut-être victime de son gigantisme... et aujourd'hui, il ne reste que la plus petite espèce de la famille.
Un animal nocturne et solitaire
Le koala est surtout nocturne et, comme beaucoup de mammifères qui vivent la nuit, c'est un solitaire : 90 % des animaux observés par le chercheur Ian Eberhardt vivaient seuls. Mâles et femelles
adultes ont des domaines vitaux séparés, celui d'un mâle recouvrant celui de plusieurs femelles, comme c'est le cas chez de nombreux mammifères placentaires (le tigre, par exemple).
A Kangaroo Island, en Australie, par exemple, les territoires des mâles font 1,5 à 2 hectares, contre 0,5 pour celui d'une femelle. Un mâle et une femelle dont les territoires se superposent
vivent habituellement chacun de leur côté : il arrive qu'ils se croisent, mais les véritables rencontres n'ont lieu que pendant la période de reproduction. Le reste du temps, chacun s'évite
soigneusement. Et chaque koala défend son domaine vital contre un intrus du même sexe : on peut donc bien parler de territoire.
Une glande odorante
Les rencontres entre deux mâles sur le même arbre entraînent des combats féroces au cours des quels l'intrus est chassé par l'animal résident.
Les femelles sont moins agressives et se battent rarement entre elles.
Quand cela est sur le point d'arriver, elles poussent des cris perçants, en arrondissant les lèvres, et en plaquant leurs oreilles en arrière.
Leurs altercations ne durent que le temps d'un coup de patte ou d'une morsure, et sont accompagnées de petits glapissements et autres gloussements.
En dehors de la saison de reproduction, les contacts sont rares entre les individus. Cependant, chaque animal sait en permanence qui l'entoure ; il est en communication indirecte avec ses voisins
par des marquages olfactifs. Les femelles marquent passivement leur territoire en urinant ou en déféquant. Les mâles adultes signalent leur présence en grattant des objets verticaux, généralement
le tronc des arbres, et en frottant leur glande sternale (c’est une glande odorante qu'ils possèdent sur la poitrine). C'est la base des troncs d'arbre qui est plus précisément marquée : le mâle
koala, au sol, embrasse - au sens propre du terme - le tronc en levant le buste et il y frotte sa poitrine tout en tendant le cou.
Extérieurement, cette glande se présente comme une zone triangulaire où les poils sont plus courts. Elle produit une substance jaunâtre et visqueuse, à odeur forte mais pas désagréable, selon
Eleanor Russell (décédée le 4 Août 2008), scientifique australienne travaillant sur la communication chez les marsupiaux. On peut d'ailleurs facilement faire sortir du produit de cette glande en
la pressant.
Des cris agressifs et perçants
Seuls les animaux adultes se servent de ce mode de communication, comme l'a constaté un autre chercheur australien. En outre, ces marquages odorants sont liés au cri particulier poussé par le
mâle pendant la reproduction : en captivité, un marquage effectué par un mâle provoque souvent des cris de la part des mâles voisins.
Après un combat, le mâle victorieux éprouve souvent le besoin de marquer son territoire, ce qui est, en schématisant, une façon d'asseoir sa suprématie : il montre en quelque sorte qu'il est bien
le maître chez lui. De même, lorsque Malcolm Smith présentait à ses koalas des objets nouveaux ou lorsqu'il les mettait dans un enclos qu'ils ne connaissaient pas, ceux ci s'empressaient de
déposer leur odeur. C'est une manière, là encore, de délimiter son territoire et, également, de se rassurer : le koala, en rencontrant son odeur, sait qu'il est chez lui.
Dans la plupart des cas, les mammifères nocturnes ne sont pas bruyants et ont un répertoire vocal peu développé. Le koala ne fait pas exception à la règle, en ce sens qu'il n'emploie que huit
cris en tout, peu différents les uns des autres. Cependant, c'est un des marsupiaux australiens les plus bruyants. Il existe plusieurs cris agressifs selon le caractère plus ou moins sérieux du
combat. Pendant les bagarres violentes, les mâles poussent de forts grognements, surtout quand la mâchoire de l’un est plantée dans l'autre !
Les koalas réagissent aussi par des cris à ce qui se passe autour d'eux. Ainsi, quand un congénère passe à proximité sur une branche ou approche de leur arbre, ils émettent un grondement bien
audible et, pour ce faire, tirent leurs lèvres en arrière et rabattent leurs oreilles en avant. Ce cri de mauvais augure est entendu surtout chez les femelles qui se croient en danger.
Le koala aime dormir bien calé au creux d'une fourche d'arbre. Lorsqu'il fait froid, il se roule en boule et évite ainsi des déperditions de chaleur importantes. A la saison chaude, il s'allonge
sur une grosse branche.
Pour aérer sa fourrure, toujours très épaisse. Il dort souvent le jour, et se tien bien dissimulé dans le haut des arbres, mais se réveille à la moindre alerte. Lent à se déplacer, il est une
proie facile à capturer pour ses prédateurs.
Quel tombeur ce grimpeur !
Sur le plan anatomique et physiologique, le koala est spécialisé pour une vie arboricole et un régime alimentaire folivore. Il est très adapté à la vie dans les arbres, a un grand sens de
l'équilibre et des muscles des cuisses puissants, implantés très bas sur la jambe, ce qui est très efficace pour grimper, même si cela ralentit son déplacement. En revanche, fait rare parmi les
mammifères arboricoles, le koala n'a pas de queue. (Seuls le paresseux sud-américain et le loris, un prosimien asiatique, sont dans le même cas). Mais, quand il s'agit de grimper, le koala compense
ce manque par des doigts bien larges et des griffes développées ; il s'accroche d'abord solidement à l'écorce, grâce aux griffes de ses pattes antérieures, puis hisse son corps en montant les deux
pattes postérieures en même temps. Il procède de façon inverse pour redescendre, en gardant toujours la tête vers le haut.
Pour faciliter la progression sur des branches de petit diamètre, le pouce et l'index sont opposables aux autres doigts de la main, tandis que le pouce seul est opposable aux autres doigts de
pied. Paumes des mains et plantes des pieds sont granuleuses, ce qui améliore l'adhérence sur les surfaces lisses. D'autre part, le tube digestif du koala s'est beaucoup modifié pour lui
permettre de digérer les feuilles d'eucalyptus (dont il se nourrit presque exclusivement). Le gros intestin, où s'effectue - par fermentation bactérienne - la digestion de la cellulose, est très
développé. Au début du gros intestin, le cæcum peut atteindre 2,5 m de long, soit trois à quatre fois la taille de l'animal. Enfin la paroi de son estomac possède une glande complexe, dite
cardio-gastrique, qui joue également un rôle dans la digestion.
La façon de vivre du koala est adaptée à une alimentation peu niche : ce grimpeur économise son énergie. Ce qu'on appelle son taux de métabolisme basal, c'est-à-dire la quantité d'énergie
consommée pour maintenir son corps en vie, au repos, est faible comparé à celui d'autres animaux de même poids. Sa fourrure, très isolante, limite les déperditions de chaleur. Grâce à elle,
l'animal se singularise aussi, parmi les mammifères arboricoles, par le fait qu'il n'utilise pas de nid. Seuls les dendrolagues, petits kangourous forestiers, partagent cette habitude avec lui.
Le koala dort en boule, calé contre une fourche ou sur une grosse branche, protégé de la pluie et du soleil par son épaisse fourrure. Il se déplace lentement, et le moins possible. Autant il est
à l'aise dans les arbres, autant il est maladroit et vulnérable au sol, bien qu'il puisse courir relativement vite. En fait, il ne descend à terre que pour changer d'arbre et - parfois - pour
consommer au passage de petites quantités de terre, qui lui apportent des éléments minéraux.
Comme la plupart des mammifères nocturnes, le koala a une très mauvaise vue mais un très bon odorat qui lui sert pour communiquer avec ses semblables et pour se nourrir. Les feuilles comestibles
sont choisies en grande partie par l'odeur. L'ouïe est également développée, bien que le koala ait un répertoire vocal pauvre. Des analyses de cri et l'observation d'animaux en captivité ont
permis à Malcolm Smith, chercheur australien, de répertorier huit cris différents : celui des petits qui appellent leur mère d'un ton plaintif ressemblant à celui d'un bébé qui pleure ; une sorte
de gloussement allant jusqu'au grognement sourd, qui exprime la menace ; trois autres cris, qui vont du grondement sourd au cri perçant ; le cri agressif des femelles ; enfin deux cris
particuliers aux mâles : ils grondent quand ils se battent et ronflent d'une façon caractéristique pendant la période de reproduction.
On distingue trois sous-espèces de koalas, selon les régions : Phascolarctos cinereus adustus, au nord-est de l'Australie, dans l’état du Queensland; Phascolarctos cinereus, à l'est, en Nouvelle
Galles du Sud ; Phascolarctos tinereus victor, au sud-est, dans l'état du Victoria. La fourrure du premier est plus courte, adaptée au climat chaud et d'un gris tirant sur le rouille ; celle du
second est plus brune, tachetée de gris cendré; celle du troisième est plus longue pour résister aux températures plus basses.
Deux ennemis principaux
Le koala a peu de prédateurs. Les gros rapaces s'en nourrissent occasionnellement, mais ses deux principaux ennemis sont, et de loin, le dingo, un chien sauvage que l'on suppose avoir été
domestiqué jadis par les aborigènes, et surtout l'homme. Le dingo attaque le koala quand celui-ci s'aventure au sol. Il tue les animaux vieux ou les malades, mais un adulte en bonne santé peut
lui tenir tête et lui infliger de sérieuses blessures : le koala attaqué s'adosse à un arbre et lance de vigoureux coups de ses pattes puissantes. Comme celles-ci sont armées de fortes griffes,
le dingo ne peut pas le saisir. Et dès que son ennemi a une seconde d'inattention, le koala se réfugie en une série de bonds jusqu'au feuillage de l'arbre le plus proche.
Les aborigènes chassent traditionnellement le koala, qui constitue une proie facile en raison de ses habitudes casanières et de ses mouvements lents. A l'approche d'un danger venant du sol,
l'animal a l'habitude de se dissimuler, au lieu de prendre la fuite. Les aborigènes repèrent facilement l'animal dans son arbre, puis tirent à l'arc, lancent une sagaie, ou grimpent l'assommer
avec un bâton.
Cette chasse, vitale pour les aborigènes, n'a jamais mis l'espèce en danger car ils ne prélèvent qu'un nombre limité d'animaux. Les prédateurs étant rares, les populations de koalas sont
naturellement limitées par leur comportement social et par les maladies. Le koala, animal territorial, a sa portion d'espace, de laquelle il chasse les autres. Si tout l'espace est occupé, les
jeunes juste sevrés ne peuvent pas s'établir dans un endroit suffisamment abondant en nourriture. Dès lors, continuellement chassés par leurs congénères, ils finissent par mourir : quand il y a
trop de koalas, ils sont affaiblis par la sous-alimentation et par le stress dû aux agressions continuelles... Ils deviennent alors plus vulnérables à la maladie: les écrits de l'époque montrent
qu'entre 1887 et 1889, ainsi qu'entre 1900 et 1903 de grandes épidémies, infections ou parasitoses intestinales - décimèrent des millions de koalas.
Leur dernier ennemi naturel est le feu, qui peut se déclarer spontanément dans les forêts de l'intérieur, très sèches. Il se propage alors sur d'énormes surfaces. Souvent, les incendies ne
détruisent pas les eucalyptus, mais, au contraire, favorisent la production de nouvelles feuilles. Cependant, les malheureux koalas trop lents pour fuir, sont brûlés sur place.